lundi 6 juin 2011

insomniac/amnesiac

et soudain l'insomnie me prend......

........ un jour j'étais tellement fatiguée que je me suis convaincue qu'"insomniac" était le titre d'un très bon album de Radiohead avant de me rappeler qu'il s'appelait "amnesiac".

Mais le procédé doit être du même acabit, en ordre inverse. Si l'insomnie fait sortir les idées du cerveau et les laisse mariner là haut sur le plafond de la chambre, s'étalant pour prendre des dimensions insoutenables - tout problème devient toujours irrésoluble par nuti d'insomnie - ou alors - oh joie insoupçonnée - des allures profondément créatrices (qui parfois retombent comme un soufflé au réveil), l'amnésie prive le cerveau de tout fondement.

vierge
atone
vide

est notre esprit.

Si les idées fusent et diffusent sur le plâtras de la chambrette - comme si notre cerveau, par un beamer invisible, dardait ses rayons sur l'écran blanc du plafond, le phénomène est inverse dans l'amnésie. Tout est avalé par un trou noir.

je me rappelle qu'une fois, il y a peut-être cinq ans, j'ai passé une journée entière à ne pas me rappeler le mot "scalpel". Là, plus près de moi, je ne me rappelais plus du mot "alhambra", j'avais beau essayé de le faire ressusciter dans ma tête, mais seul venait "alcazazar" et des images de cuisses emplumées qui semblaient dépareillées aux ors nasrides.

Bref, vient un temps où il faut admettre qu'une certaine forme d'amnésie nous prend le temps aidant. Déjà oubliés les théorèmes de Pythagore et je ne parle même pas des tangentes et autres cosinus. Des bancs de l'université me restent quelques anecdotes.
et je me dis que j'ai été sotte de ne pas journellement coucher mes impressions et autres dialogues. Mais pour faire revivre le tout, pour donner vie au soufflé désagrégé de ma vie, il faut du Michel Butor ou alors carrément du Proust, et je n'ai aucune vie de prêter le jeu à une comparaison que je sais d'avance ridicule.

amnésiaque...

le cerveau vide
atone
vierge

comme une tabula rasa. Comme ces gens qui disparaissent, hâpés par un panneau "déviation" sur le chemin du boulot. Se prêter au jeu du recommencement, car c'est tellement plus facile de faire face.

de recomposer
une à une
les images du plafon
pour en faire émerger la signification.

Toute vie ne se résume-t-elle pas à rassembler les signes présents sur notre route, et à y insuffler du sens? Que les symboles cessent de résonner comme de l'airain et prennent chair?

Les idées, une rassemblées, vont ainsi sagement reprendre place dans ma tête, et moi pouvoir me rendormir.