samedi 30 juillet 2016

Pour le 1er août - la Suisse existe-t-elle?

Nous sommes un peuple qui n’existe pas

Si l’on réfléchit, qu’est-ce que la nation suisse ? Une formidable invention du XIXe siècle, encore plus spectaculaire que ce que la troisième République a réussi à faire en France.
Des mythes fondateurs de guerriers alpins, jetant par-dessus les moulins les Habsbourgs, l’archiduc noyé dans le lac, les nobles écrasés sous les cailloux de Morgarten, Gessler terrassé par la tempête alors que son sort était le carreau d’arbalète....
Se réécrire, créer un ciment qui a toujours manqué.

Tous les historiens s’accordent à dire que le pacte de 1291 n’était pas un pacte fondateur. Pas de volonté de construire un pays commun. Juste un réseau de solidarité, d’entraide commune guerrière entre deux communautés montagnardes qui ne comptaient pas se laisser dicter sa loi par les hommes de la vallée.
La Suisse des XIII cantons avaient certes la notion de constituer quelque chose en commun, mais elle n’est guère allée au delà d’une confédération liée par les serments de ne pas s’allier Tout seul à l’étranger. S’il y avait une nation, il y en avait 13, et pas une seule indivisible. La Diète n’était là que pour régler les affaires courantes.
En fait, il y avait un sentiment d’appartenance, mais à son Stand, à son canton. C’est peut-être là la véritable nation. Une addition de cantons, et  la somme des parties  est-elle forcément davantage ? Avait-elle un petit supplément d’âme.

Les guerres de religion ont divisés les esprits, et  le  Sonderbund en fut le dernier avatar. On se dit que pour les affaires ce n’était pas bon. Et l’on mit sur pied la constitution de 1848, qui elle créa un pays. Mais une nation, peut-on en dire autant ?
Les gens aiment à opposer les régions linguistiques, et fonder un pays romand. Mais je crains qu’ils se trompent lourdement.
Travailler à Berne puis vivre à Zurich m’a fait découvrir que les Suisses allemands sont loin d’être monolithiques, et que finalement Bâlois et Genevois ont plus en commun que ces derniers avec les Jurassiens.

Après la constitution de 1848, peut-on dire qu’il y a une nation ? On crée des mythes fondateurs, certes, on l’enseigne à tous, ils s’exportent même à l’étranger. A tel point que nous croyons avoir inventé la démocratie directe dès le XIIIe siècle et que nous avons servi de modèle aux Américains, alors que le bicamérisme de 1848 vient directement de la constitution américaine. E t que les constitutions oligarchiques des cantons a subsisté après la fin de la Confédération.

Finalement qu’est-ce qui fait que la Suisse est un peuple ? L’est-elle vraiment ?
 Je dirais que oui : il y a une certaine volonté de rester ensemble, même si certains crachent sur les forces d’ouverture à l’oeuvre dans ce pays, comme s’ils vivaient encore dans les montagnes du XIIIe siècle.
Pour être provocatrice, mais même pas, je dirais que le ciment de la Suisse provient de l’immigration. Face aux autres qui s’installaient « chez nous » ; nous avons dû définir un minimum de sentiment d’appartenance. JE parle de la vie de tous les jours, et pas des mythes fondateurs. Ce  sont les étrangers qui s’installaient puis s’acclimataient, des familles dans différents cantons, qui ont créé un mouvement dans un pays exsangue où la libérté d'établissement n’existait de facto à cause des dissensions religieuses et ce  jusqu’au XIXe siècle.
Dans ce pays qui refuse toute force vive, et assimile le conflit à la destruction, comment peut-on s’exalter ? Certes le consensus est un outil politique de stabilité, et une manière très diplomate de rallier les minorités. Mais il manque parfois un grand souffle, une volonté de savoir où l’on veut aller. Qui fait défaut.
Surtout dans un monde qui a l’air de chanceler, et certains esprits barbares veulent faire croire à la guerre des civilisations.
 Nous devons savoir ce que nous sommes, 26 « peuples » au sens de communautés liés par la démocratie directe, par la mixité culturelle apportée par tous les hôtes qui se sont installés. Là sont les véritables valeurs suisses.

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